Le papillon des Mille-Etangs  

                                          

                                      

 

         

  

 

 

 

 

 

_ Papa !!! Tu ne vas pas t’y mettre toi aussi, intervint le maire.

_ Monsieur le maire ! J’approuve son opinion, interpella le pharmacien du bourg, Monsieur Robinson. Un septuagénaire arborant éternellement sa blouse blanche immaculée, munie d’un badge où on pouvait lire « Monsieur Ludovic Robinson, Dr en pharmacologie ». Le crayon toujours dans la bouche, il articulait comme s’il mastiquait en même temps un aliment. Le crayon était un substitut de tabac. Ce n’était pas par souci de santé ou parce qu’il considérait le tabac comme une mauvaise habitude, mais plutôt par économie.

Son fils unique, âgé d’une quarantaine d’années, était trisomique. Toujours souriant, Panpan, était adoré de tous, sa seule obsession était de ramasser toutes sortes de papiers qui trainaient par terre, sur les trottoirs, même devant les portes des boutiques du bourg.

 Avec toutes ces interventions inopinées, une vague de chuchotements souleva dans la salle. Marie avait la gorge serrée. Elle regardait l’assemblée pendant un moment, puis se dit-elle : « Le seul fait de regarder cette cochonnerie était pénible, et voilà que j’en prenais un bain ! »

 Elle ferma les yeux, serra les poings. Sa gorge se noua, elle sentit les larmes forcer le passage et lutta d’un « Non » étouffé et rageur. Elle maugréait contre la ville, les gens, le monde entier… « En moi, quelqu’un a planté la graine de la haine. Depuis, l’arbre n’a jamais cessé de pousser. »

A cette pensée, le rouge lui monta aux joues.

Puis soudain elle hurla.

_ Aller au diable, les affaires et tous les touristes, bande d’égoïstes !!!

 

 

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