Le papillon des Mille-Etangs  

                                          

                                      

 

                                                                      

      

   

         

Le sénateur reconnut son stratagème habituel : il consistait à poser des questions qui semblaient tomber du ciel ; mais, cette fois, ça ne marchait pas.

_ Ah ! Bonjour Lieutenant, que faites-vous là ?

_ Avez-vous une seconde à me consacrer, Monsieur ?

_ Non, répondit-il. Et je n’ai pas l’intention d’en discuter.

_ Juste une simple conversation.

_ Dites plutôt que ça vous réjouit de me cuisiner.

_ Très juste.

Le sénateur eut soudain l’air furieux. Dans cet état de rage particulière qu’il avait déjà montré, la première fois qu’il l’avait interrogée au moment où il enquêtait sur l’assassinat de Lucie. Mais pourquoi diable s’acharnait-il ainsi contre lui? On aurait dit une sorte de mélange explosif, du feu entrant en contact avec une nappe d’essence…

Il fixa sur le lieutenant un regard impassible.

_ Une certaine Andréa Emmett, ça vous dit quelque chose ?

Encore un de ses fameux coups de harpon ? Une fois de plus, il allait être déçu. Il ne mordrait pas à l’hameçon. Surtout que ce nom lui en disait long.

_ Oui, pourquoi ? S’enquit-il d’un ton las.

_ Rien de spécial, juste qu’elle prétendait vous connaître.

Soudain, le sénateur eut peur que ses poumons ne refusent de continuer à fonctionner. Comment osait-il lui jeter un truc pareil en pleine figure ? Et, en plus, ce n’était pas le moment de lui montrer qu’il avait touché le point sensible. Qu’il considérerait cela comme une nouvelle victoire. Sale flic.

_ Une parmi tant d’autres, répliqua-t-il d’un air blasé. Excusez-moi, c’est l’heure du discours, je dois vous laisser Lieutenant. Sur ceux, il tourna les talons en direction de l’estrade présidentielle.

 

 

 

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